Mort et initiation en Egypte ancienne, par Fernand Schwarz, directeur national de Nouvelle Acropole en France
Fernand Schwarz, anthropologue et philosophe, a consacré les trente dernières années à étudier les structures mythiques et symboliques des sociétés traditionnelles, notamment celle de l’Egypte ancienne.
Le Nil, traversant l’Egypte du nord au sud, trace ainsi une ligne de partage entre Orient et Occident et témoigne par là même d’une première structure symbolique centrale pour la civilisation de l’Egypte ancienne : celle de deux horizons, de deux seuils dont le franchissement constitue le passage, dans la continuité, d’une forme de vie à une autre. Il a donc été question, lors de cette conférence, d’un objet central dans la métaphysique égyptienne, la mort, et d’un processus fondamental dans la vision évolutive des égyptiens, l’initiation.
En Egypte ancienne, mourir ne constituait pas une fin et un point de rupture, mais bien au contraire une renaissance, autrement dit une naissance sous une forme autre. A la mort, le moment était venu d’enfanter son âme dans l’au-delà et de s’élever au plan de la spiritualité. Se défaire de son corps physique pour « passer à son Ka » constituait non pas une expérience anxiogène, mais la promesse apaisante de rejoindre le monde de l’invisible, de redevenir énergie vitale.
Une telle perspective était d’autant plus anticipée avec sérénité, que les égyptiens pouvaient faire l’expérience, de leur vivant, du passage entre le visible et l’invisible, entre le profane et le sacré à travers l’initiation. Les égyptiens distinguaient en effet deux états de connaissance, l’une objective accessible par la raison analytique, et l’autre bien plus intérieure et intuitive. L’initiation, à travers les épreuves de la vie, ouvrait la voie à cette deuxième forme de connaissance. Assumer la vie par ses épreuves, vivre l’enseignement qui s’en dégage et dégager par là un nouveau potentiel amène bien à une forme de connaissance en lien avec sa propre intériorité profonde, puisqu’étymologiquement connaître c’est naître avec. Ainsi, l’initiation pour les égyptiens témoignait du passage irréversible d’un état de conscience inférieur à un état de conscience supérieur. Ce parcours d’éveil se retrouvait symboliquement dans celui que l’on effectuait à l’intérieur des temples, chaque salle représentant l’activation, tout au long de la vie et du parcours d’initiation, d’un aspect différent de l’homme jusqu’à l’actualisation pour le défunt de la composante Akh, celle de la puissance spirituelle supérieure, lumineuse et efficace.
Pour conclure, mort et initiation en Egypte ancienne illustrent toutes deux la destinée de l’homme, toujours situé entre deux mondes non pas opposés mais connectés par son potentiel à assumer les contradictions, à trouver un équilibre dans l’impermanence et à relier ce qui visible et ce qui est invisible.
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