Ce mercredi 3 mai plus de 180 personnes se sont retrouvées à l’Athénée Municipale de Bordeaux pour écouter la conférence consacrée au chamanisme, animé par Fernand Schwarz, anthropologue et égyptologue reconnu.

Après avoir situé la notion de chaman et le lien qui en a été fait dernièrement dans de récentes recherches (Université Paris 8), le conférencier introduit la “chamanité“ qui porte l’idée que nous sommes relié par des forces invisibles, qu’il y a des plans plus subtils qui affectent notre réalité, la matière et notre quotidien. Ainsi nous pouvons comprendre qu’au-delà des cultures chamaniques, il y a une nécessité globale de se relier à des plans de conscience autre que ceux que nous avons l’habitude de concevoir. Dans la vision chamanique toute chose matérielle est une objectivation d’un élément énergétique. Il y a un monde visible et un monde invisible.

Le chaman est un médiateur qui nous permet de retrouver le lien à l’âme, ce qui anime, ce qui met en mouvement. La vie circule quand c’est le cas. Sinon elle ne peut pas s’exprimer et la personne souffre. Maître du désordre, sa mission principale est de gérer l’aléatoire. Les crises sont des opportunités pour se transformer, pour penser autrement, pivot de la philosophie pratique. Nier nos crises, ou être incapable de les assumer conduit à une désharmonie, un réel déséquilibre des forces, et c’est ce qui nous rend malade. Ordre et désordre sont les éléments d’une même pièce, et sont nécessaires à l’harmonie du tout.

Le désordre permet la réorganisation, la transformation, le renouveau. Ceci implique mourir à quelque chose et naître à autre chose. Le sacré est cette dimension de la conscience qui nous permet de voir autrement et qui exige une dimension d’élévation. Mircea Eliade nous rappelle qu’il y a le sacré de fusion (approche dionysiaque) et le sacré de respect (approche apollinienne). L’approche dionysiaque se vit souvent dans les fêtes par un processus d’inversion instantanée du monde, de ses lois, de ses normes. Le rite sacré se fait alors d’une façon directe, nue, et se vit sous la forme d’un état d’excitation lyrique, d’une transe extatique, où le divin prend possession de l’homme et le transporte hors de lui-même. Dénudé de son voile, l’être touche la chair même du sacré. Une société qui ne sait pas faire la fête est morte nous dit Fernand Schwarz, cet événement qui rompt avec le quotidien et qui relie.

La pensée analytique découpe les choses, rend notre conscience fragmentaire, isolée et particulière. C’est une vision utile et performante mais qui ne correspond pas à la réalité, incapable d’englober les contradictions ou d’incorporer le grand tableau de notre nature et de la nature de l’univers. Ainsi, les pratiques chamaniques ouvrent des portent, des passages pour passer du langage binaire de notre quotidien vers un langage synthétique qui unit les contradictions. Grâce aux symboles et aux images, l’Homme a la capacité de toucher à une vision holistique. L’ensemble forme un tout supérieur à la somme du tout.

Le chamanisme intègre le physique, le psychique, le mental et le spirituel. La “chamanité“ c’est le partage avec la culture chamanique d’une vision du monde, d’une compréhension commune vers une finalité commune : celle d’élargir notre conscience et de rétablir nos liens avec le symbolique et la profondeur des relations avec soi, avec autrui et avec notre environnement.

La conférence s’est clôturée par une projection d’images qui reliaient les pratiques chamaniques à d’autres pratiques antiques de l’extase : la Grèce antique avec les mystères d’Éleusis, l’Inde avec Shiva, l’Égypte avec Sekhmet.

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